Le concept de « l’inconscient colonial » au cœur d’une rencontre universitaire
Des Universitaires et chercheurs algériens ont rappelé, lors d’une rencontre sur la mémoire culturelle organisée mercredi à Alger, « la nécessité d’écrire l’histoire par des plumes algériennes à partir d’une approche culturelle qui questionne l’histoire. »
Organisée par le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (Cnrpah) en collaboration avec le Centre national du livre (Cnl), cette rencontre a été animée à la Bibliothèque nationale, par les académiciens et universitaires, Ali Khefif, Salim Hayoula, Khaled Otmanine et Oualid Benbouaziz, à l’occasion de la Journée nationale du Chahid, célébrée le 18 février de chaque année.
Sous l’intitulé Mémoire et planification culturelle, l’enseignant à l’université de Annaba, Ali Khefif a relevé la nécessité de « saisir les contenus culturels constituant la mémoire pour comprendre l’histoire tout en tenant compte des aspects identitaires auxquels elle se réfère. » Selon lui, « les productions éditoriales et artistiques (films, pièces de théâtre, chansons, poésies…) qui interrogent l’histoire par des plumes et des conceptions culturelles autochtones et dévoilent les zones d’ombre entretenues par la pensée occidentale, demeurent insuffisantes. »
De son côté, l’enseignant à l’université de Médéa, Salim Hayoula, a souligné l’importance de « réhabiliter la mémoire nationale en réécrivant l’histoire à partir de ses non-dits », citant les exemples de, Frantz Fanon qui a permis, a-t-il précisé, de « saisir le fait colonial et Rachid Boudjedra qui a mis à nu, dans son œuvre Hôtel Saint-Georges, l’influence de l’esprit colonial, réducteur à l’égard des Algériens et émancipateurs. »
Evoquant le texte d’Edward Said, Albert Camus, ou l’inconscient colonial, et Le premier Homme, roman autobiographique inachevé d’Albert Camus, Salim Hayoula a mis en avant le paradoxe de la mutation intellectuelle chez Camus, avant de rappeler la nécessité de « revaloriser les manuscrits » et consacrer ainsi l’identité culturelle, comme assise à l’écriture de la mémoire.
Le professeur à l’université de Khemis Miliana, Khaled Otmanine, a communiqué sur l’inconscient colonial régnant à l’époque, semé, entre autre, à travers la multiplication des publications qui avaient fini par inonder le marché, allant jusqu’à inciter les colons à « écrire leurs propres littératures », ce qui a amené, dans la première moitié du XXe siècle, l’émergence de « l’Algérianisme, un mouvement intellectuel qui avait pour mission de « véhiculer et généraliser l’esprit conquérant. »
Khaled Otmanine a préconisé d’étudier cette période pour établir cette stratégie malveillante de plus, destinée à mettre à exécution les intentions colonialistes de l’occupant français.
L’enseignant à l’université Alger 2, Ouahid Benbouaziz a quant à lui, basé son compte-rendu sur la décolonisation de l’histoire, expliquant d’abord « les concepts des vocables, histoire et mémoire et la relation entre les deux, avant d’aborder la pensée colonialiste à travers plusieurs exemples d’œuvres qui prônent le retour de l’esprit conquérant », à l’instar de La mémoire, l’histoire et l’oubli, ouvrage du philosophe Paul Ricœur.
Les conférenciers ont conclu sur l’importance de créer « un imaginaire culturel d’union » d’où partiraient de nouvelles approches pour l’écriture de l’histoire de l’Algérie.