Appel à la création d’une instance scientifique de toponymie
L’académicien et linguiste Farid Benremdane a appelé, jeudi lors d’une rencontre à Alger, à la création d’une instance scientifique algérienne de toponymie qui aura pour mission la gestion des noms propres des lieux en Algérie afin d’organiser ce domaine, asseoir un référentiel des appellations et participer à la construction de l’identité et de la mémoire, a rapporté l’APS.
Le Docteur en linguistique et chercheur Benremdane, qui a participé à un projet sur la toponymie au Centre de recherches en anthropologie sociale et culturelle (CRASC) d’Oran, a plaidé pour la création d’une « instance officielle » chargée de la gestion des toponymes (noms propres désignant les lieux), car il s’agit d’une « question de souveraineté nationale », faisant état d’une accumulation de connaissance de plus de 20 ans au CRASC pouvant être mises à profit pour la création d’une telle instance.
Faisant état de « dizaines de références » sur la toponymie en Algérie qui pourraient être exploités à cet effet ainsi que des « thèses universitaires » et des expériences locales, il a cité, à titre d’exemple, le chercheur international en géographie Ibrahim Atoui.
Dr. Benremdane a insisté, également, sur l’impérative coopération dans ce cadre avec les institutions officielles, à l’instar du ministère de l’Intérieur, le Haut-Commissariat à l’Amazighité (HCA) et le Conseil national économique, social et environnemental (CNESE).
Il a souligné, dans ce sillage, l’absence d’une instance de toponymie en Algérie, à l’exception de la commission « consultative » au niveau du Conseil national de l’information géographique (CNIG), à l’arrêt depuis plusieurs années.
Les plus grands pays du monde disposent d’instances officielles de toponymie, à l’instar des Etats-Unis et du Canada, a-t-il poursuivi. Evoquant les conclusions du projet de recherche du CRASC, M. Benramdane a relevé l’absence d’une « unification de l’écriture » en Algérie, déclarant que certains noms de lieux dans le sud algérien, dont plusieurs d’origine amazighe sont écrits de 17 manières différentes tant en arabe qu’en latin.
Il a cité, dans ce sens, la ville de « Touggourt dont le nom amazigh signifie le haut lieu », précisant qu’elle est écrite de 10 manières différentes, ajoutant que cette « diversité d’erreurs est présente même dans les documents officiels. » Après avoir souligné une différence de sens pour le vrai nom de ce lieu, que ce soit en arabe ou en amazigh, il a relevé que cette confusion a atteint l’international avec Internet. Il a estimé à ce propos que la numérisation va aggraver la situation en l’absence d’une organisation locale de ce domaine.
Cette anarchie a des impacts sur l’identification négatifs pour les toponymes en Algérie, explique M. Benramdane qui a rappelé que ces impacts ont touché aussi « l’identité et la profondeur historique qui s’étend au Sahel », précisant que la France avait déformé les noms propres en Algérie.
Cette rencontre a été organisée par le HCA sous le thème Les dix nouvelles wilayas, toponymie et développement durable.