Houria Aichi, l’universel chant de la terre et des racines
Il est quelque chose d’indiciblement émouvant dans sa voix, toute une montagne qui s’édifie au caprice de ses mélodies. Une mosaïque palpitante, unissant l’amour et la spiritualité et susurrant le rêve dans sa fécondité débordante. Son prénom fredonne liberté, Houria Aichi incarne le chant tendre des Aurès et de toute l’Algérie. Née au pied du massif montagneux des Aurès, l’enfance de Houria Aichi se nourrit de chants de sa terre natale, interprétés par sa mère et sa grand-mère. Elle collecte ces chants pour aller les scander dans les quatre coins du monde.
« Quand ses racines sont claires. Quand on est sûr soi-même d’où l’on vient et qui l’on est, on peut aller sans crainte vers le monde,» aime-t-elle à dire. Pour Houria Aichi, on peut faire d’une musique traditionnelle, répandue chez un public minoritaire, une musique qui s’affirme sur les plus prestigieuses estrades du monde. Cela ne peut être que l’œuvre d’une personne dont l’ancrage dans sa culture surpasse le seul stade de la de reconnaissance pour atteindre celui de la participation active à l’écriture de l’universalité.
Pour Houria Aichi, il n’y a guère de vie digne « si on ne s’inscrit pas dans une terre, dans une culture, dans une tradition. » Interprétant un chant féminin qui traverse les époques et préserve sa nature revendicatrice d’une culture, Houria Aichi participe à son tour au projet de l’émancipation d’une nation avec ses diverses composantes. Son art ne se limite pas à l’interprétation du répertoire aurésien, mais il reprend les chansons de plusieurs femmes algériennes de différentes régions et de différentes variations linguistiques à l’instar de Cheikha Zhor, Cheikha Tetma et Cherifa. Aidée par un musicien algérien qui connaît, selon elle « la musique algérienne dans sa totalité », elle rend un hommage profond à plusieurs chanteuses algériennes en en choisissant 11 et parcourant ainsi l’Algérie du Sud à la Kabylie, des Aurès et au Mont Chenoua et à Lalla Setti, de Kenadssa à Dzair Beni Mezghana
Outre son statut de sociologue, Houria Aichi a été découverte en tant qu’artiste en France en 1984. Cette découverte, grâce à sa voix envoutante et à l’authenticité et l’originalité de son art, lui a ouvert grand les portes pour une tournée internationale qui la consacrera comme l’une des voix les plus singulières qui travaillent à sauvegarder le patrimoine immatériel du Maghreb et à l’arrimer à l’universalité. Accompagnés d’instruments de bases, une Guesba et un Bendir, et portant ses racines comme une belle écharpe et sa voix comme unique viatique, elle a séduit le monde par ses chants.
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Avec plusieurs albums dont Chant de l’Aurès, Hawa, Khalwa, Chants Sacrés de l’Algérie, Les Cavaliers de l’Aurès, Houria Aichi s’est imposée, à coté de Taos Amrouche, comme l’une des voix majeures du patrimoine musical berbère d’Algérie. Aujourd’hui, elle est considérée comme l’incarnation de la culture aurésienne dans sa veine féminine qui a bercé l’enfance de plusieurs générations. En se produisant dans des pays comme les États-Unis d’Amérique, la Scandinavie, l’Allemagne, la France, elle a fait sonner les trompettes de sa notoriété.