«Je rêve d’écrire l’un des meilleurs romans qui aura été publié sur ce pays» (Saïd Mekbel, journaliste assassiné)

Saïd Mekbel, qui a commencé le journalisme à l’âge de 18 ans avec un certain Henri Alleg, alors directeur d’Alger-Républicain, rêvait d’écrire « l’un des meilleurs livres, l’un des meilleurs romans qui aura été publié sur ce pays », confie-t-il à Monika Borgmann dans son livre entretien intitulé Saïd Mekbel : une mort à la lettre.

Ayant rencontré Kateb Yacine et Tahar Djaout qui l’encourageaient à continuer d’écrire, Saïd Mekbel n’a pas baissé les bras, et a succédé au célèbre auteur de Nedjma dans sa rubrique sur Alger-Républicain. Quant à Tahar Djaout, « il  disait que j’avais plus d’imagination que lui, que j’étais plus doué que lui, que je pouvais faire œuvre d’imagination. Et que j’avais beaucoup de cœur. Tandis que lui trouvait qu’il était plutôt froid » raconte Saïd Mekbel à Monika Borgmann.

Conscient de son identité intellectuelle multiple, Saïd Mekbel ne s’aligne pas sur son unique domaine de formation universitaire qui est la physique, mais il interroge aussi les formes littéraires de tous les continents. « Là, maintenant, je sens que j’ai découvert mon originalité. J’ai découvert que j’étais Américain, que j’étais Africain, Méditerranéen, et j’ai quelque chose de Sud-américain. Quand je lis ce que les Latino-américains écrivent, ce sont des choses que je sens, que je peux écrire. Et puis la Méditerranée, c’est toute ma civilisation. Tout en restant vers l’Afrique. Mais je ne me sens pas du tout arabe. Et je sens aussi que je peux écrire dans un registre que l’on n’utilise pas chez nous » explique-t-il, souhaitant de tout son cœur « écrire le Don Quichotte de Cervantès ou du Marquez », étant partisan de la fantaisie.

Mesmar Dj’ha a promis d’écrire un « bouquin » qu’il extirpera de la poussière de sa chambre où se trouvent un tas de documents, « Parce que c’est ça, c’est le décor de ma chambre, c’est comme ça que je vis… C’est pas très sain, c’est pas propre, c’est… Mais, dans cette chambre, je suis en compagnie des plus grands génies du monde […] Il faut que je voie la toile d’araignée, qui est en haut à droite, toute l’odeur des journaux, toute cette poussière, les livres par terre et tout ça… C’est quand j’aurais sorti le manuscrit de là-bas que ça se passera bien. C’est là, c’est tout.», dit-il, heureux de sa compagnie et déterminé à tenir sa promesse que la mort lui amputera.

 

 

 

 

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