L’humanisme de Bonnard

De tous les peintres qui existent, c’est bien Bonnard que j’aime le plus. C’est un artiste ‎‎‎postimpressionniste, autrefois membre du groupe des nabis. Chez lui, le dessin est aléatoire, ‎avec moins de proportions aux choses, et parfois une ignorance feinte de la perspective.

Ne travaillant qu’en atelier, l’artiste se distingue en faisant un retour « aux fondamentales », sachant qu’il est avant tout un des impressionnistes : ces impressionnistes qui avaient quitté justement l’atelier à la recherche de la lumière.

Pourquoi ‎naviguait-il à ‎‎l’orée de la peinture non académique. Savait-t-il dessiner ? Chez lui, même l’art brut est perçu, surtout quand l’‎‎on cherche parmi les fractions. Bonnard montre la vie telle quelle, sans jongleries, sans vouloir en rajouter, que ce ‎‎soit une nature morte, une flopée de gens dans la rue, ou un quelconque ‎paysage, c’est la vie qui ‎‎est célébrée, dans toutes ses formes, comme pour en extraire son essence et sa vitalité. Sa ‎célèbre La-place-de-clichy est plus que merveilleuse. Et les Deux élégantes de la Place Clichy avec sa ‎célèbre déhanchée, fameuse aussi ! Le peintre veut que l’on contemple ‎les habitants et que l’on ‎partage leur ‎vie la plus intime. Je me suis longtemps demandé pourquoi ce ‎peintre peinturlurerait ainsi sa ‎toile, la ‎salissait presque, ce qu’il faisait de façon délibérée sans doute. C’en est ainsi ! C’est la dérision qui dénote l’art, ‎n’est-ce pas ? ‎Donc, tout comme pour le ‎dessin, ce n’est même pas la couleur qui l’intéressait à ce ‎point, même si cette dernière crève les yeux, même s’il reste un maître de la maîtrise ‎incomparable de la lumière et de la couleur. Pour ‎lui l’art n’est qu’un prétexte, ‎ eut-on dit, un ‎support pour servir simplement l’expression. C’est l’amour de la chose « à montrer ‎‎» qui a de la ‎valeur à ses yeux, plus que toute autre chose ; ‎peu importe la manière par laquelle ‎on s’y est ‎pris, peu importe le style. S’il peint un marchand de poisson debout près de sa charrette, l’intention et de faire venir les gens sur place, pour qu’ils voient « ces » mêmes poissons, pour qu’ils parlent au vendeur ; etc. Amoureux de la vie, Bonnard vise à l’expression du banal et ce qui nous semble anodin, avec ses œuvres uniques qui expriment ‎la vie dans toutes ses facettes, ou sinon un ‎désir de vie ‎intense. Une vie traduite par un humanisme continuellement porté en lui.‎ Les mouvements du fauvisme, cubisme, surréalisme, qu’ont suivi les avant-gardistes ne l’intéressaient pas. Bonnard prenait ainsi son chemin tranquillement, en suivant sa voie, sa propre voie.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *