Retour en ritournelle
Demain c’est la rentrée universitaire. Sur fond de pandémie persistante et d’incertitude exténuante. Signature de reprise et accolades tonitruantes. Au pied d’affiches rabougries et piteusement pendantes. Sur des murs désespérément gris. Annonçant, comme chaque année, les dates et les salles de la même comédie. Examens accommodés.Epreuves à distance. Puis devoir surveillé. Puis devoir spécial. Puis devoir exceptionnel. Puis devoir de l’avant-dernière chance. Puis rattrapage. Puis repêchage. Et enfin passage. Pour tous les étudiants. Y compris ceux qui n’ont strictement rien pigé. Et pour lesquels les études se réduisent à une présence physique durant quatre années. La réussite par l’attente est garantie. Car devant une telle profusion d’épreuves factices, les enseignants jettent l’éponge. Notamment pour ceux qui ont, à chaque fois, des milliers de copies à corriger. Et cette aberration dure depuis des années. Elle remonte à l’époque du populisme démagogique-pédagogique. L’ère de la formation de masse. Ou plus précisément de la formation en masse. Avec une soi-disant réforme de l’enseignement supérieur qui a explicitement opté pour le pullulement de la quantité. Pour la perméabilité précédée de la porosité. Comités syndicalo-pédagogiques à l’appui. Au bout de cinq décennies, les plis ont trop bien pris. On traverse l’université comme on traverse indolemment un couloir. A la sortie duquel se trouve assurément le papelard. Car, quatre fois le même examen avec surveillances, corrections, jurys spéciaux, c’est de toute évidence, une insupportable fustigation pour les enseignants. Un supplice à répétition. Que beaucoup décident d’esquiver en mettant un dix partout. Dès la première correction. Afin de vaquer tranquillement à leurs occupations. Ouvrant la voie à des cohortes de cancres qui encombrent pesamment les bancs des amphis et influent lourdement sur la rythmique de l’enseignement. Impactant le niveau pédagogique et la qualité de la formation. Sans compter l’atmosphère générale qui n’a strictement rien d’un campus universitaire. Une gigantesque garderie pour adolescents hagards. Tentant de tromper leur mal être en le traînant piteusement entre les bancs et les galeries. À longueur de journée. En attendant la fin de l’année. Puis la rentrée. Pour l’examen spécial, l’examen exceptionnel, l’examen particulier, l’examen spécifique et surtout le sésame du rattrapage. La clé magique qui ouvre grandement la porte du passage. En attendant le diplôme. Qui mène tout droit vers une voie de garage.