Coronavirus-Les élucubrations de Mustapha Cherif
La lecture rapide du
texte de M. Mustapha Cherif intitulé « La fin du monde » publié
dans El Watan appelle de mon point de vue les observations suivantes.
Il dit que, presque de façon concomitante, c’est la fin du capitalisme
ultra-libéral et du matérialisme collectiviste.
Je suis d’accord pour la fin du capitalisme qui, depuis Reagan et Tchatcher, a tout fait pour tuer l’idée d’État et ses fonctionnaires (moins de pompiers, moins d’infirmiers, moins d’enseignants etc.) et on en voit les conséquences dramatiques lors des incendies géants. En Grande Bretagne, la crise de la vache folle était due, entre autres raisons, à la quasi-disparition des vétérinaires publics. Aux USA, la vague d’accidents d’avion dans les années 90 et 2000 était due à la quasi-disparition des contrôleurs civils aériens. On pourrait multiplier les exemples et il n’est pas sûr que tous les États concernés aient pris les mesures nécessaires pour s’en prémunir.
Il nous dit en filigrane que ce qui reste comme espoir pour demain, ce sont les transcendances, les spiritualités, bref en un mot comme en mille, les religions, victimes selon lui de « marginalisation ».
Mais lorsque le philosophe de Miliana nous parle de l’échec du matérialisme collectiviste, il aurait pu nous dire de quel État il parle au juste, à quel type d’États il fait allusion. Il doit savoir que l’espace géographique où aurait dû se développer ce matérialisme collectiviste (URSS et Pays de l’Est + La Chine) a complètement changé de variables et , tout compte fait, il est assimilable aux États capitalistes puisque les mêmes dysfonctionnements y existent ( grande pauvreté, inégalité des revenus, oligarques arrogants, racisme etc. ).
Par contre, après avoir tiré sur le capitalisme et le matérialisme collectiviste, il nous dit en filigrane que ce qui reste comme espoir pour demain, ce sont les transcendances, les spiritualités, bref en un mot comme en mille, les religions, victimes selon lui de « marginalisation ».
Les sociétés du monde voient très clairement que leur salut, si salut il devrait y avoir, sera l’œuvre des scientifiques, des infectiologues, des épidémiologistes, des infirmières, des ambulanciers et non pas celle d’un imam, d’un rabbin ou d’un évêque.
Lui a-t-il échappé que depuis quarante ans environ, le religieux a refait irruption dans les débats publics à l’échelle de tous les continents, que ce soit lors de l’élection de Menahem Begin en Israël, de l’arrivée de l’Ayatollah Khomeini en Iran ou encore de celle du Pape Jean Paul II ou du Dalaî Lama ? Sur ce thème de la mise en scène ou en spectacle de l’imaginaire religieux, il y aurait tant à dire.
Dans quelle planète vit-il ? Ne voit-il pas que les religions, quelles qu’elles soient, sont dans la même impasse et vivent le même échec que les politiques, qu’elles sont incapables de proposer quelque solution que ce soit, que les sociétés du monde voient très clairement que leur salut, si salut il devrait y avoir, sera l’œuvre des scientifiques, des infectiologues, des épidémiologistes, des infirmières, des ambulanciers et non pas celle d’un imam, d’un rabbin ou d’un évêque ?
Pire encore, n’a-t-il pas entendu, dans les pays musulmans, en Israël, en Inde et en Europe, ces religieux protester contre la fermeture des lieux de culte contre l’avis unanime des scientifiques ? N’a t-il pas vu que les religions sont loin de défendre les intérêts des citoyens en voulant absolument maintenir ouverts les lieux de culte, leur fonds de commerce pour parler vulgairement ?
Il ne le dit certes pas expressément mais il pense très fortement que ce qui devrait guider toutes les gouvernances, c’est un retour « à la culture de la modération, du droit et de la dignité, préconisées par le Coran et le Prophète ».
C’est joliment dit mais ce discours ne vaut pas mieux que celui de tous les salafistes, de Chemsou à Djaballah, qui préconisent, eux aussi, le retour au 7ème siècle.
Au moment où tous les peuples, quels qu’ils soient, sont plongés dans l’angoisse d’un virus extrêmement agressif, seule la parole et la pratique scientifique restent audibles, crédibles et dignes d’intérêt. Tout le reste, cher monsieur, c’est de la littérature.
Quelle que soit notre attitude vis-à-vis des croyances, les gens savent aujourd’hui qu’aucune spiritualité, aucune transcendance pour garder votre vocabulaire, n’est en mesure d’offrir à l’humanité l’avancée scientifique qui peut ou va nous sauver demain. La fermeture de tous les lieux de pèlerinage, toutes religions confondues, est bien le signe avéré de cet échec.
Ce petit pays envoie des médecins depuis 40 ans dans 102 pays et c’est lui, et pas un autre, qui vient au secours d’une grande nation comme l’Italie. Matérialisme collectiviste, disiez-vous ?
Dire le contraire aujourd’hui, au cœur de cette effrayante pandémie, c’est se mettre au niveau de ceux qui rendent les plus mauvais services aux religions. Ceux qui, tels des fanatiques écervelés, souhaitent encore rassembler les fidèles dans un instinct suicidaire comme à Mulhouse où un regroupement religieux a fini par mettre à plat le système de santé de tout un pays.
À propos du matérialisme collectiviste qu’il a mis intentionnellement dans le même sac que le capitalisme sauvage, il y a un pays, un tout petit pays qui s’appelle Cuba dont les fulgurances médicales, scientifiques et agricoles ne doivent rien aux transcendances, aux spiritualités et aux religions. Ce petit pays envoie des médecins depuis 40 ans dans 102 pays et c’est lui, et pas un autre, qui vient au secours d’une grande nation comme l’Italie. Matérialisme collectiviste, disiez-vous ?