A propos du quartier d’Eckmühl d’Oran, de son origine, et des arènes

Eckmül qu’on prononce à Oran « Kmine » (ou el « Kimine » pour les raï men), est un quartier populaire très connu par les oranais. Actuellement dénommé « Hai Mahieddine », il se trouve dans le sud-ouest de la ville d’Oran en Algérie. Il est aussi, et surtout, le quartier qui a vu naître le « King » du Raï, Cheb Khaled.

Voyons donc quelle est origine de ce terme.

Eckmül ou Eggmühl selon la graphie en vigueur en Allemagne, est un petit village de Bavière appartenant à la commune de Schierling, dans le Haut-Palatinat. Elle fut le théâtre de la bataille d’Eckmühl remportée par le maréchal Louis Nicolas Davout le 22 avril 1809 sur les Autrichiens.

Le maréchal Davout reçut de Napoléon Bonaparte le titre de Prince d’Eckmühl pour ce fait d’armes.

Eckmühl est également un célèbre phare situé sur la côte atlantique française, dans la commune de Penmarc’h, dans le Finistère en France, qui fut nommé ainsi à la mémoire de Louis Nicolas Davout sur la demande de sa fille, qui mit la somme de 300.000 francs pour la construction de l’édifice.

Et c’est à Eckmül aussi que se trouvent les fameuses arènes d’Oran.

Les arènes d’Oran sont un bâtiment circulaire destiné essentiellement à l’accueil de corridas, situé au sud-ouest de la ville d’Oran, à Eckmül donc.

Il s’agit des uniques arènes d’Algérie et une des rares arènes du continent africain.

On sait que l’histoire de la ville d’Oran est marquée par une longue période de présence espagnole, pratiquement de 1505 à 1790.

Ceci explique qu’après la parenthèse ottomane, les Espagnols s’y soient rendus plus nombreux qu’ailleurs en Algérie après la prise d’Oran en 1830 en tant que migrants, constituant ainsi une main d’oeuvre pas chère dans cette Algérie coloniale que la France construisait.

Edifiés pendant la présence française, les arènes témoignent donc de l’influence culturelle hispanique restée vivace dans la cité cosmopolite qu’était Oran.

Des arènes en bois primitives sont inaugurées le 27 mai 1890, avant d’être remplacées, suite à un incendie, par le bâtiment contemporain construit en 1908 et inauguré le 14 juillet 1910.

De nombreux courses et spectacles y sont donnés.

Les corridas sont interrompues le 15 juillet 1936 lors du déclenchement de la guerre civile d’Espagne. Elles reprennent en 1954, après une réfection, portant ainsi sa capacité d’accueil de 7000 à 10000 spectateurs. Elles sont également fermées en 1960 pendant la guerre d’Algérie.

Les arènes, ou « Plaza de toros » ont reçu des « matadors » célèbres comme El Cordobés, Pepe Ordoñez, Miguel Mateo, José García Lupion…

En raison de leur acoustique de qualité, elles ne furent pas utilisées que pour la tauromachie, mais également pour d’autres festivités tels que des combats de boxe et de catch, des concerts…

Le chanteur Etienne Daho est né et a grandi aussi dans le quartier populaire d’Eckmühl, là où les balcons s’apostrophent en espagnol. Il habite rue Jean-Macé, qui donne sur l’avenue d’Oujda, régulièrement embaumée par les parfums de l’usine des Cafés du Brésil.

Non loin, dans les gigantesques arènes, les fringants toreros en culotte moulante délaissent parfois la piste pour faire place aux catcheurs et aux vedettes de variétés.

Par exemple, en noeuds papillon et smokings blancs, les « Platters » se produisent dans ce lieu unique, lors d’un inoubliable concert, en 1958, ainsi que le célèbre Pierre Peret, et d’autres chanteurs de l’époque.

Après des travaux de réhabilitation lancés en 2009, les arènes ont rouvert leurs portes au public oranais en 2018.

Il n’en reste pas moins que bien qu’il s’agisse d’un édifice historique d’une grande valeur esthétique, il est assez peu utilisé de nos jours, et reste négligé par les autorités…