L’œuvre de Mouloud Mammeri comme terrain de questionnements

Dans l’ouvrage collectif Mouloud Mammeri : intellectuel enchanté, romancier désillusionné, trois universitaires spécialisés dans la littérature de langue française interrogent la place de l’intellectuel dans la société algérienne, à travers l’œuvre et le parcours de l’auteur de La colline oubliée.

Cet ouvrage de 144 pages paru récemment aux éditions Frantz-Fanon a été conçu et dirigé par Mohammed Yefsah, docteur en lettres et arts et enseignant à l’université d’Oran.

Dans cette étude, Djemaa Maazouzi, enseignante et chercheure au Canada, propose une lecture du roman L’opium et le bâton sorti en 1965, une œuvre qu’elle considère comme « l’épreuve de la libération » et qui s’articule autour du village comme chronotope de la guerre recouvrant les éléments spatiaux et temporels du récit.

L’universitaire s’intéresse également aux univers fictionnels qui se déploient dans les écrits de Mammeri et aux personnages qui y prennent place formant une polyphonie. Elle accorde un intérêt particulier au personnage principal de  L’opium et le bâton  qui échappent à l’idéalisme qui motive la guerre et révèle une « individuation de la libération. »

L’image actuelle de Mouloud Mammeri est également au centre de la contribution de l’universitaire Malika Assam, spécialiste des langues, littératures et sociétés du monde et enseignante en France, qui évoque le passage du statut de « savant » à celui de « héros de la revendication identitaire amazighe. »

A travers son analyse, elle révèle une réappropriation de la vie de l’écrivain et de son œuvre et la diffusion d’une nouvelle image de Mammeri qui fait de lui un « repère partagé renforçant la revendication identitaire. » Cette analyse s’appuie sur la célébration de Mammeri par des poètes, des célébrités de la chanson et une multitude d’associations culturelles.

Enseignante à l’Université Mouloud-Mammeri, Malika-Fatima Boukhelou, auteure en 2017 de Mouloud Mammeri : mémoire, culture et tamusni, participe dans cet ouvrage avec une lecture du roman La traversée paru en 1982 et qu’elle estime être une suite de La colline oubliée publié trente ans plus tôt.

Mohammed Yefsah s’intéresse de son côté à la réception du roman La colline oubliée (1952) par la presse de l’époque, réinterrogeant une querelle basée sur des postures idéologiques. Il estime que Mammeri le « multiple » est souvent « cloisonné », loin de la totalité et de la complexité de l’homme en s’appuyant sur les multiples critiques que le roman et l’auteur avaient essuyé à l’époque dans le camp algérien.

Le prix des Quatre Jurys attribué à La colline oubliée en 1953, va amplifier, selon Mohammed Yefsah, la méfiance envers Mammeri.

L’ouvrage compte propose également un entretien réalisé en 2017 avec le réalisateur Ahmed Rachedi sur son adaptation au cinéma du roman L’opium et le bâton.

 

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