« Artristes »
Malraux leur avait bien dit que l’art était un anti-destin. Mais ici, ils n’ont même pas de destinée. Juste un semblant d’existence blême. Au gré des aléas. Et aux détours des hasards. Car quand ils ne sont pas laissés pour compte, ils sont niés. Installés dans l’univers glacial de l’intervalle, de l’intermittence, de l’aléatoire et de l’incertain. Au mieux, dans celui du possible antérieur ou du futur moins que probable. Et quand ils ont une tombe pour seule demeure, on se rappelle enfin, qu’ils étaient artistes, comédiens, peintres, musiciens, poètes, ou écrivains. Surtout vains.
Car quand ils ne sont pas laissés pour compte, ils sont niés. Installés dans l’univers glacial de l’intervalle, de l’intermittence, de l’aléatoire et de l’incertain. Au mieux, dans celui du possible antérieur ou du futur moins que probable.
Comme ce rituel obséquieux du takrim post mortem. Aussi insipide que ronflant. Apanage funeste des bureaucrates attitrés, de la culture momifiée. La culture administrativement ossifiée. Pétrifiée. Fossilisée. La culture des tribunes et des estrades blafardes. Un rituel morbide, pour rappeler que ces créateurs marginalisés avaient choisi de s’engouffrer dans les bras ballants de l’inconnu. Se nourrissant d’idéaux, d’illusions, de rêves faméliques et de maigres serments. Les pieds plantés dans la fange et la tête enfouie dans les étoiles. C’est pour cela que la société étourdie par les vanités, les futilités et les inanités, tourne lestement le dos à tous ces marcheurs vers l’Horizon. Une société qui choisit de magnifier les âmes exiguës aux appétits vastes et insatiables. Et oublier tous ces porteurs de rêves. Tous ces besogneux des cultures. Les cultures des profondeurs. Tous ces miséreux de la création. Ces gueux de l’imagination. Tous ces comédiens, ces musiciens, ces danseurs, ces peintres, ces poètes, ces écrivains, ces artistes, qui croupissent dans la trappe ténébreuse de l’oubli. Tous ceux que les sphères de l’inculture officielle ignorent. Dans les règles de l’art.