Cendres de féminité
Quand elle n’est pas niée, humiliée, injuriée, rabaissée, outragée ou violée, elle est transformée en braise. Chaque fois que le feu des pulsions libidineuses effarouchées épanche obscurément ses flammes. Instinctivement et indistinctement. Sur tout ce qui peut ressembler ou juste rappeler le corps frêle d’une femme. L’obscur objet du désir. Vivace et inextinguible. L’objet focal et inassouvi de ces sociétés qui s’autodésignent par le couplage d’une ethnie et une religion. Et qui n’ont jamais cessé d’encrasser abondamment la première et à souiller profusément la seconde. Trop souvent en mortifiant leurs femmes. Un inapaisable objet du désir mais également un incontournable souffre douleur.Qu’on n’hésite pas à expédier en enfer. Pour assouvir des pulsions infâmes. Pour se prémunir de toutes sortes de fureur. Parfois travesties en crime d’honneur atavique. Ou en écorchure à des traditions préhistoriques. Là ou l’honneur a, depuis bien longtemps, pris la poudre d’escampette. Sans se retourner. Cédant la place à un chapelet de stupidités. Et à une kyrielle d’insanités. Pour se laver d’on ne sait quelle mauvaise conscience. Dans ces sociétés qui ont toujours le grégarisme à fleur de peau. L’hypocrisie en guise de pores de respiration. La fourberie comme pulsations cardiaques. Et la duplicité en bandoulière. Portant l’ostracisme anti-féminin comme une sinistre bannière. Tout en secrétant une ambivalence épaisse à l’égard de leurs propres valeurs. A l’égard de ce qui leur tient lieu de système de code d’honneur ou plus précisément de déshonneur. Un système contrefait où la femme a toujours été l’objet de toutes les convoitises et de toutes les indicibles bêtises. Comme celle qui a banalisé, depuis des lustres, les pratiques de cet inadmissible et répugnant crime de lèse-masculinité. Le crime de lèse-machisme et de lèse-virilité. Le crime de la discrimination qui est une véritable flétrissure de l’humanité. Un crime qui se perpétue scandaleusement dans toutes ces sociétés faussaires. Avec la complaisance épouvantable de ce qui leur tient lieu de système judiciaire. Ces mêmes sociétés qui avaient commencé par enterrer leurs filles. Toutes les filles. Et qui finissent par les calciner sans états d’âmes. Déléguant pour cette besogne ignoble, de sombres individus sexuellement et psychologiquement désaxés. Incapables de maîtriser leurs bouffées de perversion. Leurs effluves de dépravation. Ces individus qui bavent copieusement toute leur libido à la vue du moindre bout de chair. Et qui sont prompts à le transformer en torche, pour éteindre leur propre flamme. Ces sociétés sont les premières à bafouer les préceptes élémentaires au nom desquels elles prétendent fonder leur encombrante morale. Des sociétés qui piétinent outrageusement les principes religieux qui leur ont, prétendument, permis de quitter le monde des ténèbres pour celui de la lumière. Et qui ne sont jamais parvenues à régler leur problème essentiel. Leur problème perpétuel. Leur problème éternel. Leur problème avec la femme. Le lieu innomé de tous les travers, de tous les maux, de tous les malentendus, de toutes les équivoques, de toutes les infamies et de toutes les ignominies. Le point de fixation fondamental. Le nœud de toutes les envies, de tous les appétits, de toutes les passions et de tous les délires. L’exutoire de tous les sens, dans tous les sens. Le panier à crabes de tous les fantasmes. La corbeille à désirs qu’on balance aux flammes.