Le paradigme du Brouillon
Après de vagues consultations. Suivies de rapides estimations. Entrecoupées d’incertaines évaluation. Couplées à de lourdes approximations. Et livrées à de sourdes supputations. Enfin le Brouillon. Le brouillon de la constitution. Et si un brouillon, selon le lexique usuel peut être une ébauche, une esquisse ou une entame provisoire, il a surtout pour vocation d’être, embrouillé, désordonné, nébuleux et confus. Une page de brouillon a pour destinée inexorable d’être immanquablement retouchée, raturée, gommée, effacée, froissée, avant d’être, souvent, déchirée. Puis jetée à la poubelle. Une triste destinée en réalité. Comme pour la plupart des pages de brouillon. Et, bien entendu, pour nombre de notions qu’elles promènent dans les pliures de leurs lignes chiffonnées. Des lignes aussi hésitantes que chancelantes. Parfois carrément tordues. C’est peut être pour ces raisons et d’autres encore, que des mots aussi importants que Culture, Langue et Région sont quasiment absents du corps du Brouillon. De l’âme intrinsèquement noircie du Brouillon. Ou alors consignés juste pour la redondance habituelle. La litanie rituelle. Servie à la galerie pour un semblant de débat public virtuel.
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Un débat virtuellement public ou publiquement virtuel. Peu importe. Car dans le réel c’est le déni total. Le reniement abyssal. C’est notamment le cas de la langue algérienne. Rien sur les incongruités obséquieuses lui déniant un statut. Rien pour dissiper les trivialités visqueuses sur son vécu. Rien pour la valoriser aux côtés de l’autre langue nationale, enfin officialisée. Le Brouillon ne dit rien non plus sur les cultures algériennes aux richesses inouïes. Des bouquets d’imagination enfouis. Des joyaux de création piteusement ensevelis. Des mosaïques débordantes d’inventions sciemment anéanties. Le Brouillon oublie ostensiblement les réalités régionales. Aucun mot, non plus, sur les vertus du local. Ce socle fécond de l’universel. Mais rien d’étonnant dans ces césures. Car chaque fois que les mots langues, cultures ou régions sont prononcées au pluriel, on se met instantanément à agiter tous les démons de l’univers. Et même de sa lointaine périphérie. Alors que la réalité des langues et des cultures locales ou régionales, dans toute leur diversité constitue un passage incontournable, pour pouvoir saisir les mécanismes vitaux de la société dans sa globalité. Pour se donner les moyens de saisir le sens fondamental des mutations sociétales. En articulant intelligemment les cultures de la quotidienneté magnifiée aux institutions de la culture officielle pétrifiée. Des institutions blafardes, psalmodiant de pâles stupidités et répandant d’ignominieuses insanités. Par télévision interposée. Alors que les cultures locales peuvent les nourrir de leur sève. Et les sustenter de leurs rêves. Tout simplement. Car ces formes d’expression culturelles régionales et locales, sont hautement signifiantes. Elles permettent de saisir les sens et les prégnances des systèmes de représentations implicites ou explicites. Et donc de participer activement à la formation d’une vision d’intégration générale. Nécessaire à la formation d’un Etat. Dans une perspective dialectique de l’articulation du régional au national. Mais de toute évidence, le Brouillon se fout complètement de la dialectique. Comme il se fout entièrement de l’intégration régionale, culturelle et linguistique. Malgré leur foisonnante vitalité. Malgré leur éclatante vivacité. Le Brouillon ignore, de toute évidence, que le soleil ne se cache pas avec un tamis. Ni même avec plusieurs d’ailleurs.